Le cinéma américain a toujours été fasciné par le roman très nostalgique (nunuche, diront certains) qu’est LITTLE WOMEN de Luisa May Alcott, dont Greta Gerwig vient de signer une quatrième version (nommée pour 6 Oscars), après celles de George Cukor (1933, photo 1), Mervyn LeRoy (1949, photo 2) et Gillian Armstrong (1994, photo 3). Il est néanmoins scandaleux que cette version plus “féministe” que les trois précédentes n’ait pas été nommée pour l’Oscar de la meilleure mise en scène, les réalisatrices se retrouvant beaucoup trop rarement parmi les nominations. Hélas, le cinéma américain et donc l’Académie des Arts et Sciences du Cinéma Américain (AMPAS) continuent d’être dominés par l’espèce mâle. À ce jour, une seule cinéaste a remporté l’Oscar de la meilleure réalisation – Kathryn Bigelow pour THE HURT LOCKER. Une honte! À 89 ans, Clint Eastwood, qui a remporté 2 Oscars comme réalisateur, revient cette semaine avec RICHARD JEWELL, basé sur l’histoire réelle de l’homme faussement accusé de l’attentat à la bombe aux Jeux Olympiques d’Atlanta. Moins connu, certes, mais néanmoins intéressant, le cinéaste québecois Xavier Dolan récdive avec MATTHIAS ET MAXIME, parlé en québécois et – on en aura besoin – sous-titré en français. Unautre film français, LA FILLE AU BRACELET et trois avant-premières viennent arrondir le tableau de chasse d’une semaine qui a démarré avec la remise des Oscars, une sacrée tempête et qui verra, ce mardi, la présentation du programme du LUXFILMFEST 2020. Jean-Pierre THILGES
LITTLE WOMEN *****
Comédie dramatique; Réalisatrice, scénariste: Greta Gerwig, d’après le roman de louisa May Alcott; ; avec Saoirse Ronan, Emma Watson, Florence Pugh, Laura Dern, Timothée Chalamet, Meryl Streep, Chris Cooper; Directeur/Photo: Yorick Le Saux; Musique: Alexandre Desplat; USA 2019, 135 minutes; 2 nominations aux Golden Globes 2020; 6 nominations aux Oscars 2020.
Pendant la guerre de Sécession, en Nouvelle-Angleterre, quatre sœurs, Jo, Beth, Amy et Meg vivent avec leur mère en attendant le retour de leur père qui combat au front. La présence d’un charmant et riche héritier provoque toute une gamme d’émotions chez les jeunes femmes. Passionnée d’écriture, Jo braque ses yeux sur le comportement de son entourage et partage ses observations dans un roman…
- Mince alors! C’est déjà la quatrième adaptation du roman de Louisa May Alcott au cinéma (après celles de George Cukor, Mervyn LeRoy et Gillian Armstrong), mais malgré l’amour que je porte aux trois versions précédentes, celle-ci est de loin la plus réussie. En 1994, Gillian Armstrong avait déjà dépoussiéré l’histoire, mais Greta Gerwig (qui a également écrit le scénario) explose l’intrigue en un puzzle magnifique qui se permet des sauts dans le temps (en avant et en arrière) conférant une sacré modernité à un récit que d’aucuns qualifiaient régulièrement de nunuche, poussiéreux et vieux-jeu. Rien de ça dans cette version de 135 minutes qui fait passer le temps en un véritable coup de vent et qui, mine de rien, est une véritable leçon de mise en scène, de découpage, de direction d’acteurs, d’ellipses et d’autres surprises qui réunissent dans un seul et même film le Hollywood de grand-père et le cinéma contemporain – au féminin, euréka – dans la plus improbable des histoires. Tendresse, volupté, amour, finesse, drame, jubilation, tragédie, humour sont autant de mots qui nous sont venus à l’esprit pendant et à l’issue de la projection. Alors que le cinéma de grande consommation s’enfonce de plus en plus dans le préfabriqué, et au moment où Hollywood se fait même ravir l’Oscar suprème par un film (absolument magnifique) d’origine coréenne, des productions indépendantes inspirées comme ce LITTLE WOMEN peuvent redonner espoir. Greta Gerwig a réussi un sacré coup et c’est donc doublement insultant qu’elle n’ait pas été nommée pour l’Oscar de la mise en scène. Et si le futur et le destin de Hollywood reposaient aux mains des femmes? Il faudrait juste que quelqu’un le dise aux hommes. Cinq étoiles absolument méritées. (jpthilges)
- Graduating from an intimate portrait of the rocky rites of passage of contemporary female adolescence to a considerably larger-scale ensemble piece depicting the path to maturity of four sisters in 19th century Massachusetts, Greta Gerwig shows that her own assured transition to writer-director with 2017’s Lady Bird was no fluke. Her gratifying take on Louisa May Alcott’s Little Women brings freshness, vitality and emotional nuance to source material which has been etched for generations into the popular imagination, shaking up the chronology to reinvigorate the plot’s familiar beats. (David Rooney/The Hollywood Reporter)
- Saoirse Ronan and Emma Watson head a terrific all-star cast in a wonderfully warm, funny and heartfelt version of Louisa May Alcott’s coming-of-age classic. There’s nothing little about Greta Gerwig’s rich, warm, bustlingly populated and passionately devoted new tribute to Louisa May Alcott’s classic novel of sisterhood. She revives Little Women as a coming-of-age movie, a marriage comedy, a sibling-rivalry drama – and perhaps most interestingly of all, an autofictional manifesto for writing your own life. (…) This is such a beguiling, generous film from Gerwig. There is a lot of love in it. (Peter Bradshaw/ The Guardian)
RICHARD JEWELL
Le cas Richard Jewell; Drame justicier; Réalisateur: Clint Eastwood; avec Paul Walter Hauser, Cathy Bates, Sam Rockwell, Jon Hamm, Olivia Wilde; Scénaristes: Billy Ray, basé sur des faits réels; Director/Photo: Yves Belanger; Musique: Arturo Sandoval; USA 2019, 131 minutes.
En 1996, Richard Jewell fait partie de l’équipe chargée de la sécurité des Jeux Olympiques d’Atlanta. Il est l’un des premiers à alerter de la présence d’une bombe et à sauver des vies. Mais il se retrouve bientôt suspecté… de terrorisme, passant du statut de héros à celui d’homme le plus détesté des Etats-Unis. Il fut innocenté trois mois plus tard par le FBI, mais sa réputation ne fut jamais complètement rétablie, sa santé étant endommagée par l’expérience…
- Clint Eastwood goes after two of the most powerful forces in contemporary America — the FBI and the media — in this true story of a hero falsely accused of being a terrorist. (…) A good story is a good story, and Eastwood knows how to tell a good story. With “Richard Jewell,” he and screenwriter Billy Ray — drawing from the Vanity Fair article “American Nightmare: The Ballad of Richard Jewell,” by Marie Brenner — go about it in a broad and often too-simplistic sort of way, treating the “hero bomber” (played by Paul Walter Hauser in his first starring role) as a lovable loser. Still, the result is undeniably compelling, a kind of modern-day “Ace in the Hole” and a populist reflection of the public’s disdain for journalists and government alike, as told by a filmmaker (and let’s not forget: former mayor of Carmel, Calif.) with his finger on the pulse. (Peter Debruge/Variety)
- The director’s last five films — American Sniper, Sully, The 15:17 to Paris, The Mule and now this one — have focused on ordinary men doing extraordinary things, only to have them scrutinized, for better or worse, in the aftermath. In format and focus, the new film emerges as a close sibling to the aviation drama Sully, which also centered on a man who became a hero by doing his job but whose actions were similarly, if less severely, picked apart by the press and authorities. Sully raked in $241 million worldwide and, while its box office might have benefited a bit from a guy named Tom Hanks in the lead role, the new pic’s concern with the vindication of an innocent man provides a similar dramatic trajectory that’s also quite satisfying. (Todd McCarthy/The Hollywood Reporter)
MATTHIAS ET MAXIME
Comédie dramatique; Réalisateur, scénariste: Xavier Dolan; avec Gabriel D’Almeida Freitas, Xavier Dolan, Anne Dorval; Directeur/Photo: André Turpin; musique: Jean-Michel Blais; Québec 2019, 119 minutes; Festival de Cannes 2019; version québécoise, sous-titres français.
Matthias et Maxime sont amis depuis l’enfance. La famille du premier a toujours accueilli à bras ouverts le second, fils d’une mère toxicomane de condition modeste. Malgré leurs différences – Matthias, en couple avec Sarah, est avocat dans un bureau de Montréal, tandis que Maxime, célibataire, travaille comme barman dans un établissement sans lustre de la Rive-Sud –, ils ont su rester proches, formant un noyau dur au sein d’une petite bande hétéroclite et festive. Au moment où Maxime s’apprête à partir pour deux ans en Australie, les réunions entre copains se multiplient. Au cours d’une soirée, un pari perdu par Matthias le conduit à embrasser son ami pour les besoins d’un film étudiant. Dès lors, Matthias, troublé, prend ses distances d’avec Maxime, qui s’en trouve profondément affecté…
- Dans une mise en scène plus sobre et dépouillée que d’habitude, le cinéaste explore plusieurs de ses thèmes de prédilection comme l’identité sexuelle, le désir et les relations mère-fils. Mais avec ce film à la fois drôle et émouvant, Dolan a aussi voulu rendre hommage à l’amitié en filmant une bande de copains jouée par plusieurs de ses propres amis (dont Catherine Brunet, Antoine Pilon et Pier-Luc Funk). Les scènes où ils sont tous réunis sont d’ailleurs réjouissantes tellement leur complicité est palpable. En se donnant un des rôles principaux de son film pour la première fois depuis Tom à la ferme (en 2014), Dolan livre l’une de ses meilleures performances en tant qu’acteur. À ses côtés, Gabriel D’Almeida Freitas impressionne par son naturel et son charisme. Film doux et délicat rempli de tendresse, Matthias & Maxime n’a pas la charge dramatique de certaines des œuvres précédentes de Dolan comme Mommy ou Juste la fin du monde, mais il réussit à venir nous chercher différemment, tout en finesse et en retenue. (Maxime Demers/ Journal de Montréal)
- Hélas – la bande-annonce du film ne fonctionne pas après téléchargement.
LA FILLE AU BRACELET
Drame judiciaire; Réalisateur, scénariste: Stéphane Demoustier; avec Mélissa Guers, Roschdy Zem, Chiara Mastroianni, Anaïs Demoustier; Directeur/Photo: Sylvain Verdet; Musique: Carla Pallone; France/Belgique 2020, 96 minutes.
Lise a 18 ans, elle vit dans un quartier résidentiel sans hisoire et vient d’avoir son bac. Mais depuis deux ans, Lise porte un bracelet électronique car elle est accusée d’avoir assassiné sa meilleure amie…
- “Je voulais regarder cette jeunesse sans la juger. Or dans une affaire judiciaire, tout est exacerbé et le procès agit donc comme un miroir grossissant des rapports intergénérationnels. L’héroïne représente l’altérité absolue pour moi puisque c’est une femme et une adolescente. C’est pourquoi j’ai construit le scénario autour du mystère que représente à mes yeux cette jeune femme. C’est bien sûr ce qui m’intéressait. A travers ce portrait en creux, je voulais parler de la famille. J’ai trois enfants, beaucoup plus jeunes que mon héroïne, mais j’ai remarqué que très vite la question de l’altérité se posait. A qui a-t-on affaire ? On a toujours l’impression de connaître ses enfants mais l’évidence apparaît inéluctablement : ce sont des êtres autonomes qui nous échappent de plus en plus.” (Stéphane Demoustier, extrait du dossier de presse ci-dessous)
Avant-Première:
LE PRINCE OUBLIÉ *
Avant-Première:
SONIC THE HEDGEHOG
Avant-Première:
VIC LE VIKING
***
Le Mur des Lamentations (10.2.2020)
La bande-annonce nostalgique
LITTLE WOMEN (George Cukor/1933)