- Petit rappel d’un billet pas vraiment doux de Marie-Amandine, dite l’ouvreuse, dans le Feierkrop en 2014. Monsieur Thoma n’avait pas vraiment apprécié…
Vous avez déjà vécu ça, non? Donner de l’argent à un chanteur de rue pour qu’il ferme son clapet parce qu’il chante tellement faux. Cette même pensée m’a torturé l’esprit pendant les 112 interminables minutes que dure et dure et dure (dur dur!) D’Engelcher vu Schëndels.
Honnêtement, la prochaine fois que Marc Thoma et Paul Tousch menacent de tourner un film, le Filmfong et son directeur, “le jovial Daleiden”, devraient leur offrir un subside à condition de NE PAS le faire. Non, ce n’est pas une blague, l’ouvreuse mange ses propres paroles du Krop de la semaine passée, où elle saluait l’initiative de raconter cette histoire luxembourgeoise en Luxembourgeois. Elle semblait en effet avoir oublié à quel point Emil de sinistre mémoire avait déjà affecté sa santé mentale. Et ben, dites-vous que comparé aux Anges de Schönfels, ce cher Emil fait figure de chef d’œuvre. Même Ed Wood a réalisé de meilleurs films.
En fait, le film est tellement raté que le Filmfong devrait racheter les droits pour le montrer aux futurs étudiants en cinéma comme abschreckendes Beispiel, puisque l’opus majeur contient des exemples pour à peu près tout ce qu’il ne faut PAS faire au cinéma. Cela dit, sachez que l’histoire est des plus intéressantes à un point tel qu’un vrai cinéaste (je fabule et je pense spontanément à Michael Haneke et au Ruban blanc) et un vrai scénariste auraient pu en tirer un truc fascinant sur la crise économique des années 1930, sur les clivages entre “la ville” et “la campagne”, sur la misère sociale au quotidien et le Beschass dans une petite bourgade, sur la bigoterie et les bondieuseries dans un univers régi par des curetons opportunistes. Tout cela, D’Engelcher vu Schëndels aurait pu l’être, mais ne l’est pas.
Je n’ai rien contre Monsieur Thoma, dont on pourrait dire que les émissions sont d’utilité publique, mais – de grâce – qu’il arrête de se prendre pour un cinéaste. À regarder cet amas de pellicule superflue (d’accord, c’est du numérique), on se dit qu’un documentaire de 50 minutes aurait largement suffi pour raconter l’histoire véridique de cette Quisel qui se fait embobiner par les anges du ciel sous l’œil bienveillant du curé local pour finir trucidée par le diabolique maniaque du village. C’est à se demander si Monsieur Thoma va parfois au cinéma ? Des séquences interminables tournées juste pour étoffer l’intrigue, un filmage qui ferait passer Philippe Schneider pour John Ford, un montage qui s’obstine à nier l’existence du jump cut à un point tel qu’on voit le temps passer à la vitesse d’un escargot, du “placement de produits” grotesque pour satisfaire des sponsors qui ont casqué une somme rondelette pour apparaitre dans le “film” et une musique mélomaniaque d’Anselme Pau qui se fait sacrément plaisir en soulignant le moindre geste, aussi minuscule fut-il, par un flot de notes nauséabondes. Arrêtez le massacre !
Et que dire des “acteurs” en roue libre, qui ont l’air de ne pas avoir été dirigés du tout. Si Pascal Granicz a la gueule de l’emploi, il se laisse aller (ou le “réalisateur” le laisse aller) aux pires excès que l’on n’accepterait même pas d’un acteur sur la scène du théâtre local à Hannerknapphouschent. Si Catherine Elvinger et Zohra Kremer sont tout simplement ridicules, que dire de la pauvre Marie-Paule Von Roesgen (une actrice chevronnée que l’ouvreuse adore) qui rame comme une folle pour garder ne fut-ce qu’une once de crédibilité au milieu d’un amas de médiocrité totalement indigne de ce que le cinéma luxembourgeois a pu réaliser au cours des 30 dernières années. Mais le meilleur moment du film arrive quand, dans un magasin de vélos sponsorisé, Felix Eischen vend une bicyclette au petit ange à la figure sale. Epique, je vous dis ! Impayable !
Marie-Amandine
D’Jëfferche mam Krop